Coupes sélectives

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Histoire du secteur forestier canadien (article 1) : L’âge de la voile (1600-1830)

19 février 2014

Le présent article est le premier d’une série de cinq articles sur l’histoire du secteur forestier au Canada du 17e au 20e siècle (voir aussi les articles 2, 3, 4 et 5).

Le bois est au cœur du développement économique du Canada depuis des siècles. Fondé sur la demande européenne, le commerce du bois a attiré des investissements et des immigrants vers l’est du Canada. Il a favorisé le développement économique et a transformé l’environnement régional d’une façon beaucoup plus radicale que l’exploitation plus ancienne du poisson et des fourrures. Il a favorisé la construction de villes et de villages, l’ouverture de routes et l’exploration. Il a aussi parfois contribué à l’instabilité économique. Les hauts et les bas du cycle économique ont produit d’importantes fluctuations de la demande et du prix du bois, et les conditions météorologiques, les incertitudes commerciales et l’imperfection de l’information commerciale ont amplifié ces difficultés. Cependant, en s’adaptant aux difficultés au fur et à mesure qu’elles se présentaient, les industries axées sur l'exploitation forestière ont apporté une contribution essentielle à l’industrialisation du Canada et à sa transformation en puissance économique mondiale.

Construction navale : L’utilisation du vent et de l’eau comme sources d’énergie ont été des développements importants dans l’histoire technologique des nouvelles colonies. Des navires à grands mâts et à grosses voiles de toile ont assuré la liaison entre les colonies et les centres des empires (Paris en France jusqu’en 1769 et Londres en Angleterre par la suite) jusqu’à l’avènement des navires à vapeur en 1850. La construction de ces navires a été un exploit remarquable pour les jeunes colonies de la Nouvelle-France et de l’Amérique du Nord britannique et a constitué le secteur dominant de l’industrie manufacturière coloniale pendant environ 200 ans.

Bien que la conquête de la Nouvelle-France par les Britanniques en 1759 ait mis fin temporairement à ces activités, cet événement a ouvert au Canada les marchés de l’Empire britannique et a entraîné un développement rapide de son commerce et de son industrie. La perte par les Britanniques des colonies américaines (ainsi que de leur industrie de la construction navale) et par la suite des sources de bois de la Baltique ainsi que l’abondance des ressources en bois du Canada et la tradition de la construction navale établie en Nouvelle-France ont fait de l’Amérique du Nord britannique un endroit idéal pour la renaissance de l’industrie de la construction navale. Québec et Saint John (au Nouveau-Brunswick), deux centres de l’exportation du bois, sont devenus des centres dominants de la construction navale, non seulement au Canada mais dans le monde entier. Les navires étaient destinés au commerce (surtout avec la Grande-Bretagne) et étaient conçus pour porter au maximum la capacité plutôt que la vitesse, mais des événements comme les ruées vers l’or de la Californie et de l’Australie (1848 et 1851) ont également stimulé la demande de grands navires transocéaniques du Canada. Les gros navires de 500 à 1 000 tonneaux, qui convenaient bien au transport du bois, étaient privilégiés.

Bois d’œuvre et bois de sciage : Au début du 19e siècle, le bois de sciage et le bois carré étaient assurément les principales exportations de bois. Les pertes étaient considérables : de 25 à 30 % de chaque arbre étaient mis au rebut. Lorsque les sources de bois de la Grande-Bretagne furent épuisées, le bois fut importé de la région de la Baltique dans le nord de l’Europe. Lorsque cette source a été coupée par les opérations militaires françaises au début du 19e siècle, le gouvernement britannique a subventionné les sociétés qui voulaient développer les ressources en bois de l’Amérique du Nord et des camps de bûcherons ont fait leur apparition dans les forêts des Maritimes et du centre du Canada. En raison des préférences de l’Empire britannique, le bois d’œuvre de pin blanc est devenu l’exportation principale du pays. En 1805, 9 000 chargements de bois d’œuvre (5 500 tonnes) sont arrivés en Grande-Bretagne du Canada. En 1846, le total des expéditions est passé à 750 000 chargements (465 000 tonnes). Rien qu’à Saint John, il y avait 450 navires utilisés pour le commerce du bois en 1840.

L’eau était nécessaire au transport du bois d’œuvre vers les scieries et les ports ainsi que comme source d’énergie pour les scieries elles-mêmes et, en conséquence, l’industrie forestière s’est développée le long des rivières du Nouveau-Brunswick, du Québec et de l’Ontario.

Chargement du bois à bord des bateaux à Québec vers 1860-1870 (fonds George Robinson) C-090135

Chargement du bois à bord des bateaux à Québec vers 1860-1870. (fonds George Robinson) C-090135 (en anglais seulement)

Industrie papetière : L’industrie papetière a été créée au début du 19e siècle en tant qu’industrie nationale qui répondait aux besoins croissants des Canadiens. De nouvelles usines de pâtes et papiers ont été bâties en grand nombre le long du système des Grands Lacs et du Saint-Laurent et de ses affluents ainsi que dans les Maritimes. Les sites choisis pour les premières usines de pâtes et papiers étaient situés sur les rivières ou les ruisseaux qui fournissaient l’eau et l’énergie nécessaires aux processus de fabrication et facilitaient le transport des matières premières (chiffons de lin et de coton à cette époque) et celui des produits finis vers les marchés.